“On n’aime pas trop les curieux ici !” me souffle Sébastien Barbier. Chez Atelier Particulier, on sait que les ateliers appliquent le dicton « pour vivre heureux, vivons cachés » aussi souvent qu’ils le peuvent. Cette phrase d’accueil de Sébastien n’est pas étonnante. Elle valide comme un sentiment de privilège. Loin de donner le ton de la rencontre, elle est réflexe. Et, comme toujours, j’aurai eu la chance d'une opportunité rare. Celle de l’échange intime qui donne les moments que l’on garde en soi pour très longtemps.
Sébastien Barbier est doreur et sculpteur sur bois. Une trajectoire à laquelle il se destine très tôt : depuis l’âge de sept ans, il est passionné par la dorure et ses techniques. Une rencontre esthétique et artisanale qu’il doit à son grand-père. À l’occasion de l'anniversaire de sa mère, ce dernier avait fait restaurer et redorer un baromètre Louis XVI en bois doré. Au moment de la question du choix des études, la décision de Sébastien Barbier était déjà prise depuis longtemps : l’artisanat, et plus précisément la dorure, sera son chemin !
Après une première formation et grâce à une détermination sans faille, il convainc le sculpteur sur bois Michel Guillanton, Meilleur Ouvrier de France, de le prendre en apprentissage. Autre sculpteur sur bois, Yves Fouquet contribuera également à sa formation. Des expériences qui lui permettent aujourd’hui de jouir d’une double maîtrise : dorure et sculpture sur bois.
Pour le compte de galeries, de clients privés et d’institutions culturelles, Sébastien Barbier récupère, restaure et dore des cadres et des boiseries. Après avoir traversé l’Histoire et les siècles, ces œuvres se retrouvent dans cet atelier intime pour retrouver l’éclat de leurs premiers jours.
Les techniques de dorure sont nombreuses. Sébastien Barbier nous confiera que chaque artisan a aussi ses propres pratiques. Une diversité de savoir-faire qu’il se doit d’étudier et de connaître pour restaurer au plus près d’un présent dépassé. Passionné, le doreur décide de partager avec moi l’une des techniques artisanales de dorure à l’eau, celle dite “à la détrempe”.
Si un cadre arrive dans l’atelier, il a sûrement traversé des épreuves. Recoller, boucher et le nettoyer de ses imperfections sont nécessaires pour initier la restauration.
Sébastien Barbier se lance dans la réalisation du substrat, parfois appelé la colletta. Un mélange de craie finement broyée, de colle de peau de lapin et d’eau. Cette pâte servira de support pour l’or. Les multiples couches seront poncées pour épouser les formes du cadre.
Il s’attache ensuite à l’assiette. Délicatement étalée sur le support, cette pâte réalisée à base de bol d’Arménie permet l'adhérence des feuilles d'or.
Vous vous souvenez de la colletta ? Grâce à la technique du bain-marie, Sébastien Barbier détrempe le support. Avec la chaleur, la colle se révèle et est prête à accueillir la matière dorée.
Déposée sur son coussin, la feuille d’or est coupée aux dimensions souhaitées.
Sébastien Barbier passe la palette en poils de Martre sur sa joue. Un véritable rituel qui permet à la feuille d’or de mieux adhérer sur son futur support grâce au sébum secrété par notre peau. Il dispose aussi d’une virole en laiton avec une pierre d’agate pour écraser l'or et le polir sans rayures.
Une fois les feuilles d’or appliquées et séchées, la phase de brunissage débute. Celle-ci apporte l’aspect usé au cadre, permettant l'illusion parfaite.
Jaune comme le soleil. La lumière des bougies se reflète sur l’or, offrant plus de clarté à la pièce. C’est pour cela que l’on nomme la teinte des boiseries françaises “le blanc de roi”.
L’or est inévitablement la pièce maîtresse du doreur. Sébastien Barbier m’explique que l’or n’est pas le seul métal qui compose ses feuilles. Avec des feuilles de deux microns d'épaisseur, l’or serait bien trop fragile. Afin de lui donner plus de dureté, un mélange délicat d’or, de cuivre, de zinc ou de plomb est réalisé. Une opération chimique qui n’est pas sans impact puisqu’elle altère les couleurs, ce qui explique les teintes parfois rosées ou vertes de certaines dorures.
Avant d’être appliquées, les feuilles d’or sont suspendues dans un livret. Chaque livret contient 25 feuilles. Tout est parfaitement calibré, numéroté. Ensuite, tout se joue avec le souffle, une main risquerait de détruire la feuille d’or. Sébastien Barbier respecte la tradition française en ayant recours à un coussin à pouce : ce carré douillet de vélin surmonté d’un parchemin, pour limiter les courants d’air, accueille l’or. Une zone de choix pour réaliser la coupe qui sera ensuite prête à être déposée sur le support.
Comme tout passionné, Sébastien Barbier affectionne chaque étape du processus, même s’il concède que la pose de la feuille d’or est toujours un moment particulier.
Les regards des clients, ravis de revoir leurs objets, sont aussi des moments inoubliables pour Sébastien Barbier. Le plaisir de voir le résultat d’heures innombrables de travail à la hauteur, voire souvent au-delà, des attentes de ses clients est quelque chose qu’il chérit.
Sébastien Barbier est quelqu’un de confiant, surprenant et attachant. Quand je l’interroge sur ses moments de doutes et ses impasses techniques, je ne sais pas à quoi m’attendre. À la place d’une confession, je partirai avec un conseil :
Si des techniques existent, elles se confrontent parfois à la réalité du support. Chacun possède son histoire, ses défauts et nécessite des approches différentes. Du stockage dans un château froid et humide, aux dégâts des eaux dans un garage en passant par des centaines d'années de nettoyage au plumeau, les risques sont multiples, mais rares sont ceux qui résisteraient au talent de Sébastien Barbier.
La plus noble des matières exige les mains du meilleur artisan. Sébastien Barbier le sait. Par sa rigueur et sa technique, il représente brillamment une caste privilégiée dans le monde des métiers d’art. On ressent dans son atelier comme un sentiment d’honneur, que Sébastien sait assumer avec la plus grande humilité. Son parcours, ses expériences font de lui un expert incontesté dans son art et pénétrer dans son atelier, c’est l’occasion rare d’en effleurer la beauté. Plus qu’une opportunité, c’est même notre devoir de perpétuer de tels savoir-faire.
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