Depuis 7 ans maintenant, une question ne cesse de revenir dans les commentaires, mails et messages privés sur les réseaux sociaux : comment porter votre pièce ?
C’est un fait. Vous êtes nombreux à nous demander de l’aide pour vous approprier l’un de nos produits. Face à ces questions, nous adoptons toujours la même attitude : bienveillance, honnêteté et pédagogie.
Nous essayons, du mieux que nous pouvons, de vous accompagner et de vous conseiller dans l’appropriation stylistique de nos pièces.
Ce n’est pourtant pas la mission centrale d’Atelier Particulier. Si vous nous suivez depuis quelques temps, vous devez le savoir. Nous sommes loin de la marque de créateur parisienne classique.
Chez Atelier Particulier, notre expertise, c’est le savoir-faire.
Nous prenons chaque jour la route à la recherche des savoir-faire qui nous (vous) font rêver, avec pour objectif de vous les livrer sur un plateau 😉
Vous l’aurez compris, pour parler artisanat et matière nous sommes toujours présents. Mais quand il s’agit de style, nous savons accepter nos limites. Parfois, il faut savoir faire confiance à ceux qui ont une réelle expertise. Nous pensons à nos ateliers, leurs designers mais aussi et surtout à nos clients, qui sont souvent de véritables spécialistes.
C’est ce que nous allons faire aujourd’hui.
Car ces dernières semaines, vous avez été nombreux à nous demander comment porter nos pièces printemps/été. En l’occurrence, nous pensons :
- Au Maillot de Bain
- A l’Écharpe en Lin Chevrons
- A la Cravate Grenadine Shantung
Le point commun entre toutes ces pièces ? Elles sont confectionnées à partir de matières peu ordinaires : le seersucker, le lin et la soie shantung.
Pour vous aider, nous avons pris contact avec un client qui a la particularité d’être un véritable passionné de vêtements : Luc.
Dans cet article, nous allons vous partager ses paroles. Nous ferons d’abord un bref rappel de l’histoire et des particularités des matières citées plus haut. Puis Luc vous donnera ses meilleurs conseils pour bien porter nos pièces d’été.
Avant de commencer, nous laissons Luc se présenter.
Je m’appelle Luc, j’habite au cœur du beau département de la Loire, stéphanois d’adoption, Haut-Savoyard d’origine. Mes passions sont le jardinage sur Sol Vivant, le Jeu d’Échecs qui apprend que le pire adversaire, c’est soi-même, le Tiramisu fait maison, la Décoration Intérieure (très proche de l’esprit du vêtement) et enfin : le Style !
Pour cette dernière passion, je suis très fan du style italien dit Tailoring Soft : nonchalant, déstructuré, ensoleillé, mais aussi du style Casual Chic (italien ou d’inspiration militaire mélangé avec des matières japonaises). Enfin, je suis un inconditionnel du jean blanc.
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La constitution de la tenue
« Qui sera la star du jour ? »
C’est exactement ce que je me dis quand je me plante devant mon dressing. C’est ma base. Je constitue toujours une tenue la veille au soir de son porté. Je construis parfois autour de l’accessoire, surtout si celui-ci est texturé. Dans la photo ci-contre trouvée sur Instagram, chacun y verra sa star : les gants cognac et ses petites dépressions caractéristiques du Pécari ? Le manteau d’un bleu particulier et ses chevrons ? ou l’écharpe texturée qui apporte la légèreté et illumine la tenue ? Voilà le genre de photo qui me fait rêver. Je trouve le mélange de textures très réussi.
Et maintenant, « pensons matière » !
Le lin : un peu d’histoire
Le lin est une fibre naturelle chargée d’histoire.
Importé en Europe il y a 2.000 ans environ, le lin y a éprouvé sa résistance.
On en connait en effet aujourd’hui le caractère respirant.
Mais l’on sait moins qu’il s’agit également d’une matière hautement résistante !
Tellement résistante que les Gaulois s’en servaient pour confectionner les voiles de leurs bateaux ! Résistante contre le déchaînement des éléments naturels, … mais résistante, aussi, à la guerre.
En effet, pour aller au combat, le célèbre conquérant Alexandre le Grand se paraît d’une armure. Et celle-ci n’était pas en métal, comme on pourrait le croire.
Mais en lin.
Enfin, sous l’Ancien Régime, aux XVIIème et XVIIIème siècle se fixa le bassin de la culture du lin dans sa région de prédilection, encore aujourd’hui. Bien que cultivé en Anjou, dans le Languedoc ou encore en Bretagne, c’est en Normandie que se fixa sa culture. Région qui représente, encore aujourd’hui, 80% de la culture de lin … mondiale.
C’est une fibre que nous aimons tout particulièrement chez AP. A tel point que depuis plusieurs saisons nous mettons à l’honneur le lin dans nos écharpes d’été.
Si le lin est surtout connu pour ses propriétés techniques il ne faut pas en oublier son potentiel stylistique. Voici la preuve par l’exemple.
Pourquoi j’aime le lin ?
Sa capacité à se froisser légèrement s’intègre bien dans l’esprit italien de nonchalance. Un coté que j’appelle vaporeux. Le lin dégage la fraicheur, la légèreté surtout si le tissage est bien conçu. Et aussi la fierté de voir que la France est son plus gros producteur mondial. Alors si, en plus, la pièce est tissée en France, j’en suis ravi !
Comment je l’associe ?
Des trois matières présentées, c’est la texture la moins prononcée. Elle n’est pas lisse pour autant. Mon approche globale du lin dans un dressing est de choisir des éléments inspirant cette légèreté. J’ai deux approches :
- Soit je veux faire oublier le vêtement en lin par des vêtements plus texturés
- Soit je veux que le lin soit mis en avant, ce que je préfère.
Voici un exemple concret avec une tenue que j’aime porter l’été.
Justement, j’aime particulièrement les écharpes en lin d’Atelier Particulier : elles apportent la touche de nonchalance finale qui donne l’impression qu’on l’a choppée au vol dans son dressing, dans l’esprit de la Sprezzatura italienne.
Je la porte en drapé sur l’épaule, un peu comme une étole romaine (et surtout pas boudinée). Le tissage de cette écharpe est brut. Elle reste stable sur l’épaule et ne tombe pas.
Ici une photo d’une tenue casual chic de l’été 2019 : un layering classique allant du plus clair au plus sombre. En camaïeu de tons terre de vêtements contenant du lin. Comme vous pouvez le voir, chaque pièce à sa texture fine et subtile, aucune ne fait de l’ombre aux autres.
Au final, avec ces nuances de bleu et de blanc qui rappellent la mer et son écume, c’est l’écharpe d’Atelier Particulier qui tranche avec toute la tenue, contrastant avec le cognac de la sacoche (d’un atelier français). Enfin, les micro-franges de l’écharpe renforcent le côté aérien.
Le seersucker : un peu d’histoire
Le seersucker a été introduit en Europe par la Compagnie britannique des Indes, au XVIIIe siècle. En Angleterre, à cause du climat peu favorable, il était rare de voir des hommes avec des vêtements en seersucker. Aussi les gentlemen de l'époque attendaient de partir en voyage, notamment en Italie ou en Afrique, pour porter leur plus beau vêtement en coton gaufré.
Savez-vous pourquoi le seersucker est si prisé en été ?
C’est parce qu’il s’agit d’une matière respirante.
Le seersucker est un tissu estival réalisé en alternant des fils de coton très tendus et des fils plus lâches : cette méthode de tissage donne au tissu un aspect ondulé et un peu froissé. Souvent, on compare les aspérités ainsi créées à des bulles d’air.
L’effet froissé du tissu allié à la légèreté du coton font du seersucker un symbole de fraîcheur. Les fils lâches génèrent plus de distance entre le tissu et le corps. Sans contact direct avec la peau, l’air circule plus facilement. Conséquence ? Vous avez moins chaud !
Autre atout non négligeable, le seersucker ne se froisse pas et se lave en machine. Jackpot !
Pourquoi j’aime le Seersucker ?
J’ai mis du temps à en porter. J’avais l’impression que le tissu faisait trop « précieux ». Il n’en est rien.
Son aspect alvéolé donne un rendu plus aérien encore que le lin. Du fait de sa texture, il prend très bien la lumière. Le tissu ne colle pas entièrement à la peau, ce qui permet une meilleure circulation de l’air.
Comment je l’associe ?
De la même manière que le lin, sans prise de tête avec des pièces qui inspirent visuellement la légèreté avec des pièces estivales.
Autant le dire tout de suite, je n’ai pas le maillot de bain d’Atelier Particulier. Je cherchais plutôt des couleurs proches de mon évolution de style casual chic militaire.
En revanche, j’abondais dans la proposition d’un maillot de bain en seersucker, ici en couleur khaki.
On voit clairement sur la photo de ce début d’été 2020 qu’il prend bien la lumière, avec ses légers reflets jaunes. Là aussi, j’ai l’impression de ne rien porter, sans pour autant avoir l’impression de faire du naturisme 😉
Le tissu léger et doux est plus agréable à porter qu’une matière qui plaque à la peau. S’il n’y a aucune différence dans l’eau, c’est une fois sorti que l’on voit l’avantage. Grâce à la structure alvéolée, il sèche plus vite. Porté ensuite avec un simple tee shirt en lin blanc ou écru, on obtient un mélange de textures subtil et intéressant, qui change des éternels maillots de bain lisses. Et ce conseil fonctionne tout aussi bien avec le maillot AP 😊
Si vous hésitez à porter du seersucker en haut, pourquoi pas commencer par le bas ?
La soie Shantun : un peu d’histoire
L’histoire de la soie Shantung prend racine dans l’une des régions les plus peuplées de Chine, située à mi-chemin entre Shanghai et Pékin. Avec ses 90 millions d’habitants, la province du Shandong est mondialement connue pour 2 raisons.
La soie s’obtient donc à partir d’un fil sécrété par le ver pour constituer son cocon avant de se transformer en papillon. Traditionnellement le ver à soie est élevé en serre pour contrôler la qualité et la régularité du fil.
Ce n’est pas le cas de la soie shantung. Les cocons sont récupérés à la main, directement sur les arbres. Comme ces vers ne sont pas élevés dans des environnements contrôlés, des irrégularités dues aux mites interrompent la longueur du filament, rendant les fibres plus courtes et plus grossières qu’un fil de soie classique. Bien entendu ces particularités ne jouent en rien sur la qualité de la soie. Elles lui confèrent juste une main et un aspect différents. Et uniques !
La soie, comme pour la fibre de laine ou le cuir, nécessite un travail minutieux pour passer d’une matière brute à une matière de luxe, telle qu’on la voit.
Voici les étapes principales :
- Le cocon est trempé dans l’eau bouillante pour le ramollir
- Le fil de soi est prélevé à la main du cocon. Cela représente 500m à 1km de fil
- Les fils sont ensuite réunis puis tordus
- Le fil est enfin teinté et filé
Chez Atelier Particulier, nous aimons particulièrement l’utilisation de la soie shantung dans l’univers de la cravate. Il s’agit du type de matière qui apporte de l’élégance et du caractère à toutes les tenues.
D’ailleurs Luc est d’accord avec nous sur ce point.
Pourquoi j’aime le Shantung ?
Quand on parle de soie, on ne pense pas texture, a priori. Or cette soie sauvage avec ses aspérités irrégulières, son côté flammé, font que la cravate à elle seule peut être la star de la tenue. J’aime l’idée qu’un accessoire, ne le soit pas vraiment. Aussi, comme le process de cette texture n’est pas contrôlé à 100%, la pièce est de fait unique.
Comment je l’associe ?
L’avantage du Shantung est qu’il peut être porté autant l’hiver que l’été. En hiver, on pense texture. L’été, on évite d’en faire des tonnes. Le rendu visuel doit être frais à l’œil. Déjà que certains hésiteront à porter une cravate l’été, inutile que celles et ceux qui voient votre tenue à l’impression d’étouffer pour vous !
Aussi, associé avec une chemise en lin à la texture flammée, le shantung est mis en valeur en mêlant deux matières à la texture brute.
Dans la photo ci-dessus, ce sont les accessoires les stars, avec l’association du bordeaux et du noisette de la ceinture.
Je rajoute enfin une pointe de nonchalance sur l’ensemble de la tenue : avec le bouton de la chemise non fermé, le petit pan de la cravate qui dépasse, les poignets de chemise retournés, la ceinture tressée peu formelle. L’ensemble donne un effet faussement négligé, pourtant travaillé sans prise de tête pour autant. La sprezzatura à portée de main en quelque sorte.
Porter de la texture en été est possible, recommandé même. Pour se sentir bien tout simplement, voire se détacher des autres tenues vous environnant.
Ceci dit, tout est question de dosage des autres pièces associées. J’espère que cet article vous a permis de penser l’accessoire comme une « star » de votre tenue.
Vous hésitez à porter de la texture ? Commencez simple, mais osez commencer.
Et vous verrez qu’évoluer en style, même lentement, passe par le fait de s’affranchir du regard des autres.
Un grand merci à Luc pour tous ses précieux conseils.
Nous espérons que vous avez apprécié ce nouveau style de contenu. N’hésitez pas à suivre Luc sur son compte Instagram pour découvrir tous ses looks et inspirations : https://www.instagram.com/dressed_and_famous/
A très vite pour découvrir de nouvelles matières et de nouveaux savoir-faire !
Benjamin, Fulbert et l’équipe AP